samedi, juin 10, 2006

Exactement



Enfin une pause après quelques semaines marathon particulièrement euphoriques, néanmoins.
Le surmenage est une drogue comme une autre, efficace.
Ça tombe bien – ce decrescendo léger – c’est l’été et une espèce de groupe aré krishna défile sous ma fenêtre en grelots, tambourins et chansons… (tout est normal) concurrençant mes propres mélodies – au grand dam du chat qui n’aime ni le chant ni la chaleur…

D’où une envie irrésistible de barboter dans la mer avec pour seul dilemme l’indice de protection à choisir… mais ce n’est pas pour tout de suite (et c'est un horizon vite épuisé).

Pleine bessettisation, en attendant, et relecture du cruel/cadencé/féminin/adéquat maternA – speciale dedicace :


« Si la conversation roule ininterrompue, étalée sur des semaines, sur des mois, sur des jours, sur des heures, et si le ruban du A se déroule et s’enroule au hasard des portes ouvertes et refermées, le dialogue, le monologue, le chant se poursuit dans l’air lourd de mots de
La cour aux mille obstacles.
Iola fredonne.
— Elle est heureuse pensent les femmes, ses amours vont bien. Car une femme ne peut chanter que par le bonheur que lui procure un homme. Il ne vient pas à leur idée que Iola peut fredonner par celle légèreté de cœur qui est la tranquillité d’esprit.
Si elle chante c’est qu’elle est heureuse en amour (ou du moins qu’elle croit l’être, c’est ce que nous verrons).
— Je rase mes poils, déclare Iola.
— Elle veut plaire, chantent les femmes.
— Ne le faites-vous pas ? demande Iola.
— Nous ne cherchons pas à faire des touches, nous, disent vulgairement les femmes.
Ah ! elle pourrait faire « une occasion » disent-elles moqueuses.
Et le rire vulgaire accompagne le pli amer de leur bouche médiocre.
— Toutes les femmes propres se rasent les poils, remarque Iola.
Les femmes se taisent parce que c’est ainsi qu’il fallait leur répondre, on vient de sous-entendre qu’elles sont sales.
À leur sous-entendu grossier il faut répondre par un sous-entendu grossier.
Elles sont vexées mais d’une vexation sans rancune parce qu’elles
comprennent.
Iola vient de parler leur langage.
C’est le jeu des femmes.
On va finir par s’entendre.
S’il s’agit simplement de renvoyer la balle.
C’est le monde des vanités froissées, des jugements hâtifs, des grossissements stupides, des glaces déformantes, des morceaux de quartz non taillés qui renvoient des images fantaisistes.
Le petit monde de l’amour-propre ulcéré, à vif.
— Vous dites cela pour moi.
— Je croyais que vous disiez cela pour moi.
Elles ne savent pas ce qu’est une parole directe.
Elles ont peur d’une parole directe.
Elles craignent le mot juste.
Car l’intelligence qui donne les paroles directes leur fait défaut, elles ne sont pas en mesure de répondre.
Elles se cantonnent dans le petit monde flou, des dessins pâles, des mots tronqués, des doubles phrases. Pour

CACHER, CACHER.

PEUR
ATROCEMENT PEUR. »


maternA, Hélène Bessette (p. 177 à 179).

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