Question de fab, épisode 4
Ou le dilemme de la couverture...
Ça y est, le prochain livre de Claire Guezengar, Sister Sourire, une pure tragédie est presque prêt à envoyer à l’impression après moult péripéties concernant la couverture. La couverture, c’est comme un titre, soit ça apparaît du premier coup, soit, ben c’est plus compliqué. Voire carrément propice aux hésitations.
Ce qui a été, en l’occurrence, le cas.
La donnée de départ était le dessin, fort réussi, de Ivo Provoost et Simona Denicolai. Un dessin conçu en noir et blanc, à la fois sobre et très chargé en sens. Il a donc fallu, comme à chaque fois, contextualiser l’image dans le cadre de la couverture, c’est-à-dire qu’évidemment, une image signifie autre chose dans un format particulier et associée à un titre (d'où le fait qu'il arrive qu'une bonne image fasse une mauvaise couverture...) Selon la place qu’on lui donne, également : centrée, décentrée, omniprésente, discrète… Un espèce de nombre d'or intuitif, adapté à chaque cas. Le noir et blanc absolu me semblant trop austère, nous avons beaucoup tâtonné…
Si je vais les évoquer, je ne vous montre pas la vingtaine d'essais réalisés pour plusieurs raisons. Tout d'abord, car je pense que dévoiler certaines coulisses choisies n'est pas faire assister à une séance de dissection. C'est-à-dire que la magie de la forme passe par l'évidence muette des procédés qui y ont conduit. Si on montre du doigt, en images, toutes les coutures, ça finit par prendre un goût de sirop pour la toux – tu les sens bien les antiseptiques ? Ensuite, parce que de toute façon, je n'ai pas la force de passer une demi heure à tout convertir en EPS, réimporter sur Photoshop et uniformiser à un format vignette... Et puis surtout, ça m'évitera les commentaires : « Oh mais je préférais la rouge ! » « Oh ben moi la jaune ! » « La noir et blanc n'était pas si mal... » Et la lassistude intense qui s'ensuivrait.
Donc voici LA couverture :
{Cliquer dessus pour la voir en moins dégueulasse...}
... noir + un ton direct orange seventies mais pas halloween, éclairant le titre. Le noir et blanc, donc, me semblait un peu plat, sa version en négatif presque mortuaire (je ne peux plus voir un livre noir en peinture), la typo manuelle (façon PanAmérica, mutatis mutandis) quoique réussie, tirait trop du côté de la caricature associée au dessin, nous sommes donc revenus à la fonte Laureli habituelle, le faisceau blanc façon poursuite de théâtre faisait penser à la belle charte de maquette des belles Éditions Cartouche (même si c’était en soi une bonne idée, transformant une partie de l’espace en public !), le rouge était trop classique, le rose trop rose, le violet peut-être un peu trop ecclésiastique et associé au noir, ça me faisait penser l'enterrement de mon arrière grand-mère en 1981, le bleu exclu, le vert – portant malheur, paraît-il – aussi, les nuances fluo étaient séduisantes, très séduisantes, mais risquaient de vibrer, en titrage, j’aimais bien mon jaune/anis en fond mais il écrasait le dessin, qu’on a donc repassé en noir et blanc pour garder les contrastes, flottant dans une mare de jaune, oui mais voilà, le jaune était quand même trop présent et ça manquait de relief… Ce jaune volait la vedette, c’est sûr. Bref, au final, deux essais tout de même concluants entre lesquels nos cœurs balançaient. Jusqu'à l’illumination (c’est dans la thématique !) de cet orange palpitant.
Le résultat d’encre et de papier le 7 janvier !
En attendant, vous pouvez lire des extraits de Sister Sourire, une pure tragédie ici. Évidemment, je ne parle dans le cadre de ce billet que d’éléments techniques, mais c’est simplement parce qu’ils sont au service du texte, et quel texte !
1 commentaire:
"la magie de la forme passe par l'évidence muette des procédés qui y ont conduit" : je note ça en lettres d'or dans mon petit carnet...
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