samedi, janvier 19, 2008

Art narratif par San Antonio

« Y’a pas : faut que je m’arrache. Surtout à un début de polar. C’est vital. J’en sais qui partent déjà. Qui disent : « Oh, bon, s’il débloque d’emblée, qu’est-ce que ça va être par la suite, quand il vadrouillera dans le gras. » Coûte que coûte, je dois m’interrompre la délirade, débander de l’envolée, que je pantèle dans la bonne action facile à suivre, péripétique, un peu fouteuse, à la limite. The recette : tante Laure. Tu prends un bon cul bien propre, une bibite vigoureuse, tu saupoudres de polissonnerie ingénieuse. Tu touilles avec de la marade, bon. Ensuite, tu ajoutes de l’action, au fur et à mesure. N’importe quoi pourvu que ça ronfle, que ça soye éprouvé solide. Sang, pétard, kidnapping, suce-pinces, horions, tueurs, espions, haut-les-mains, la porte qui se referme, le verrou tiré, la maison vide qui l’est pas, la bagnole en folie, la bombe dans l’avion, le faisceau fantôme, la colique verte, le rayon des jouets ; ensuite re-cul propre, re-bibite vigoureuse, à vis et à copulation, battez le foutre en neige, qu’il devienne ferme joliment, onctueux. Accrochez-y du calembredain de série, un peu rafraîchi, repeint... Voilà... T’en es à la page combien t’est-ce ? Pas suffisant. Plus que cinquante encore et tu partiras aux Canaries, mon oiseau chéri. Un petit effort. Cellules stimulées, caoua bien fort. Où-c’ qu’vous z’allez chercher tout ça ? Dans ma culotte, hé, peu de zob ! Y’en a plein, pis que des morpions dans la tienne, te dire ! J’ai que d’ouvrir les vannes pour que les vannes dégoulinent. Un don, hein ? Merci, mon Jésus bon Dieu. »

(In Maman, les petits bateaux..., ed. Fleuve Noir, 1975)

pour A. B.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

ah San Antonio... mon pére avait toute la collection et pendant longtemps je l'entendais rire dans la chambre sans savoir pourquoi... et puis aprés j'ai lu.... et mon petit frêre nous entendait rire dans nos chambres..... sans savoir pourquoi...

Anonyme a dit…

J´ai bien fait de le découvrir, je rigole bien c´est vrai, sans savoir pourquoi par contre !